Construction des réseaux d’interactions extracellulaires : les réseaux de l’endostatine
Abstract
Des réseaux d’interactions ont été établis à grande échelle dans des
organismes modèles et des micro-organismes afin d’étudier leur comportement
global. Dans la majorité des cas, les méthodes mises en oeuvre détectent les
interactions impliquant des protéines intracellulaires ou membranaires. La matrice
extracellulaire possède une architecture impliquant des protéines et des
glycosaminoglycanes qui jouent un rôle important dans son organisation structurale
et fonctionnelle. L’équipe a mis au point des outils pour étudier les interactions
protéine-protéine et protéine- glycosaminoglycane, notamment des puces à
protéines et glycosaminoglycanes ainsi qu’une base de données (MatrixDB :
http://matrixdb.ibcp.fr) permettant de stocker les interactions établies par les
molécules extracellulaires et de construire des interactomes (Chautard et al., 2009
et 2011).
L’endostatine, sur laquelle a porté l’essentiel de ce travail, est le fragment Cterminal
du collagène XVIII. Cette matricryptine exprimée par les neurones a été
mise en évidence dans les dépôts amyloïdes de patients atteints de la maladie
d’Alzheimer (Deininger et al., 2002). Nous avons montré qu’elle interagit avec
plusieurs protéines extracellulaires impliquées dans des pathologies neurodégénératives
comme la transglutaminase-2, le collagène VI et le peptide b-amyloïde
(Faye et al., 2009a). Nous avons recherché au cours de ce travail à identifier des
partenaires de l’endostatine exprimés dans le cerveau tels que les collagènes
transmembranaires XIII, XVII, XXIII, XXV, les collagènes VI et VIII, les neuropilines 1 et
2 ainsi que la lysyl oxydase. Nous avons construit les vecteurs d’expression de ces
protéines (à l’exception de celui du collagène XVII) et/ou de certains de leurs
domaines. Ces protéines ont ensuite été exprimées en système eucaryote puis
purifiées par chromatographie d’affinité et par filtration sur gel dans certains cas.
Ces protéines ainsi que d’autres protéines et glycosaminoglycanes
commercialement disponibles ont été déposés sur des puces d’or utilisées pour
identifier les interactions par résonance plasmonique de surface en mode imagerie
(SPRi). Nous avons identifié plus d’une centaine d’interactions établies par
l’endostatine et certains de ses partenaires qui contribueront à augmenter la taille
de l’interactome extracellulaire. Le but ultime de notre travail est en effet d’établir
l’interactome quantitatif (comprenant des données cinétiques et d’affinité) de la
matrice extracellulaire.
Nous nous sommes focalisés sur les partenaires communs à l’endostatine et
au collagène XVII et nous étudions actuellement la fonction de ces interactions au
niveau cutané, dans la jonction dermo-épidermique, dans les interactions hôtepathogènes
établies au niveau du derme lors des stades précoces de l’infection par
des pathogènes tels que les Leishmania. La mise en évidence d’interactions
supplémentaires de l’endostatine avec des protéines exprimées dans le cerveau, et
pour certaines d’entre elles impliquées dans les pathologies neuro-dégénératives,
nous ont conduit à rechercher la présence de l’endostatine dans le liquide céphalorachidien.
Nous avons détecté l’endostatine dans le liquide céphalo-rachidien et
observé une augmentation du rapport endostatine/peptide amyloïde-b (67%, p<0,05)
et une diminution du rapport endostatine/protéine tau (68%, p<0,01) chez les patients
atteints de la maladie d’Alzheimer par rapport aux contrôles. Ces rapports
pourraient constituer des marqueurs de diagnostic intéressants de cette maladie
neuro-dégénérative.