Caractérisation d’un modèle murin du Syndrome WHIM (Souris Cxcr4+/1013)
Abstract
Le syndrome WHIM (SW) est une maladie immuno-hématologique rare de
transmission autosomique dominante qui se caractérise par une abondance de verrues (W,
Warts) liées à des infections récurrentes par le virus du Papillome humain, une
hypogammaglobulinémie (H), des infections bactériennes à répétition (I) et une rétention
anormale de neutrophiles hypermatures dans la moelle osseuse (M, Myélokathexie). Ce
tableau clinique est invariablement associé à une leucopénie circulante qui affecte un grand
nombre de populations leucocytaires. Le SW se caractérise également par une hétérogénéité
génétique : les patients sont porteurs ou non d’une mutation hétérozygote du gène codant pour
CXCR4. Ils partagent un gain de fonction de ce récepteur qui se manifeste par un défaut de
désensibilisation de CXCR4 et une hypersensibilité à son ligand CXCL12. Les conséquences
in vivo de l’hyperactivité du CXCR4 muté ne pouvant être appréhendées chez l’homme, nous
avons généré, selon une stratégie de Knock In, un modèle murin hétérozygote pour la
mutation de Cxcr4 en position 1013.
Chez les souris ainsi obtenues (souris Cxcr4+/1013), l’expression membranaire de Cxcr4
est préservée et nous avons observé une leucopénie profonde et un gain de fonction du
récepteur. Ceci nous a permis d’identifier ces souris comme un modèle leucopénique du SW.
Nous avons ensuite étudié dans quelle mesure le gain de fonction de Cxcr4 muté affecte les
processus de thymopoïèse, de lymphopoïèse B et de granulopoïèse. Ainsi, nous avons pu
montrer que l’hyperactivité du récepteur muté altère la lymphopoïèse B et T, et qu’elle
perturbe le trafic des leucocytes dans les organes lymphoïdes secondaires. En effet, la rate
présente une forte hypoplasie qui s’accompagne d’une diminution aussi bien des lymphocytes
B (LB) et T (LT), alors que nous avons observé une hyperplasie ganglionnaire qui se
caractérise par une augmentation très importante des LB et LT, et s’accompagne d’une
désorganisation de l’architecture ganglionnaire. Ainsi, la lymphopénie circulante pourrait
s’expliquer par une diminution de production des lymphocytes et une altération du trafic
périphérique de ces cellules dans les tissus lymphoïdes secondaires. Enfin, l’administration à
ce modèle murin d’un antagoniste de CXCR4, l’AMD3100, a permis de corriger la lymphoneutropénie
circulante, offrant une nouvelle piste thérapeutique.
Le modèle murin Cxcr4+/1013 offre de nombreuses perspectives pour la compréhension
des mécanismes moléculaires du gain de fonction du récepteur muté, notamment des
interactions de CXCR4 avec ses partenaires intracellulaire (ex : GRK3). Il sera également
utiliser pour tester l’efficacité et la tolérance à long terme de molécules capables d’empêcher
l’induction de voies de signalisation via CXCR4 afin de développer de nouvelles approches
thérapeutiques plus spécifiques du SW.